Les coulisses du PSR - Le Bloc opératoire
Infirmier(e) de bloc opératoire : au cœur d’un métier de passion
Avant de franchir les portes du bloc opératoire aux côtés de Gwenn, infirmière chevronnée, il me faut d’abord explorer l’univers qui gravite autour de ce cœur palpitant du Pôle Santé République. Les couloirs s’animent d’un ballet incessant et méthodique, mais sous cette agitation, un silence feutré s’impose. Les bruits ici semblent comme étouffés, presque assourdis, comme si les murs eux-mêmes respectaient la solennité des lieux.
Peut-être ce calme relatif s’explique-t-il par la proximité des salles de réveil ou zones d’accueil, où les patients, allongés sur leur brancard, fixent des plafonds aux fresques apaisantes. Ou bien est-ce la concentration extrême qu’exige le va-et-vient cadencé des brancards, sillonnant les couloirs comme les voitures s’enroulent autour du rond-point de l’Arc de Triomphe aux heures de pointe. Ici, la priorité peut surgir à tout instant, de droite ou de gauche, bouleversant l’ordre méticuleusement établi la veille au gré des urgences qui s’invitent sans prévenir. Adaptabilité et sang-froid sont les maîtres mots de ces journées menées tambour battant.
Autour du bloc, chaque pièce, aussi exiguë soit-elle, a sa raison d’être. Dans ces réduits, véritable arsenal d’outils et de dispositifs, les rayonnages débordent d’équipements indispensables, soigneusement approvisionnés pour répondre aux besoins d’une activité exigeante.
Avec le temps, l’augmentation du nombre et de la complexité des interventions a stimulé l’ingéniosité collective. Une véritable armée d’abeilles en blouses bleu ciel ou bleu marine s’active ainsi avec une précision quasi militaire autour de cette ruche que constitue le bloc opératoire. Les salles dédiées à des spécialités jalonnent ce microcosme.
Être infirmière ou infirmier de bloc, m’explique Gwenn, c’est embrasser une autre facette du métier. Si les bases restent les mêmes, de nouvelles compétences s’imposent pour évoluer dans cet environnement hautement technique. Il faut assister les interventions, ne pas craindre la vue du sang, affirmer sa place au milieu des chirurgiens et anesthésistes, les épauler sans vaciller. "Je ne fais jamais rien au hasard, chacun de mes gestes est réfléchi", souligne-t-elle. Confiance en soi et rigueur intellectuelle sont indissociables.
Souvent, le passage par le bloc donne des envies d’évolution. Devenir IBODE (Infirmier de bloc opératoire diplômé d'État), par exemple, via un master de deux ans, une formation que le Pôle Santé République finance encore tous les deux ans. D’autres optent pour une Validation des acquis de l’expérience (VAE) ou accèdent au statut de « mesure transitoire », une alternative encadrée permettant d’accomplir certains actes d’IBODE pour pallier la pénurie, sans le diplôme officiel.
La relation avec les patients diffère aussi sensiblement. Avant l’intervention, Gwenn se présente toujours clairement : prénom, poste, rôle. "Habillés tous en bleu, les patients ne savent plus qui est qui." Cette présentation ouvre la porte à un échange chaleureux et à une identitovigilance naturelle. Quelques mots légers, des banalités partagées suffisent souvent à apaiser ces hommes et ces femmes à l’aube de leur intervention. Parfois, il faut aussi rassurer les parents d’un enfant hospitalisé, leur offrir sérénité et douceur, pour que l’expérience, gravée longtemps dans les mémoires, reste aussi positive que possible.
Les journées de travail s’articulent autour de longues plages horaires : 11h30 sur quatre jours, alternant petites, grandes et moyennes journées, avec des astreintes qui imposent une organisation millimétrée de la vie personnelle.
Dans cet univers fascinant, la technologie n’est jamais bien loin. Je découvre notamment un dispositif d’assistance chirurgicale qui, grâce à des capteurs, modélise genoux ou hanches afin de guider le chirurgien pour poser la prothèse la plus adaptée à la morphologie du patient. L’objectif : optimiser la pose pour un confort post-opératoire maximal.
Ma curiosité est piquée par une autre innovation : la banque d’os. Lors de certaines interventions, après consentement, des fragments osseux retirés sont traités pour être réutilisés ultérieurement comme substituts. Une pratique précieuse, notamment pour les prothèses de hanches ou de genoux.
En salle de réveil, Pauline, entourée de Lucie et Sarah, m’explique le fonctionnement : deux salles, huit infirmières qui tournent entre plusieurs postes en une journée. Accueillir les patients pour les anesthésies loco-régionales, les récupérer à la sortie du bloc, surveiller leur réveil et leur état post-opératoire avant le retour en chambre… Un turnover soutenu, notamment dès 8 heures pour les interventions pédiatriques, qui justifie pleinement cette organisation fluide.
Quand le patient quitte le bloc, accompagné de l’anesthésiste, de l’IADE (Infirmier anesthésiste) et du brancardier, l’équipe de réveil prend le relais. Aurélien – surnommé affectueusement « Zozo » – coordonne alors les mouvements, libérant les places et veillant, en concertation avec l’anesthésiste, à ce que chaque patient bénéficie de la ventilation la plus adaptée à son état.
Dans ces couloirs, tout est minutie, précision et humanité. Au bloc opératoire, plus qu’ailleurs sans doute, la passion guide les gestes, éclaire les visages et soude les équipes.



